Le label Flocon Vert...nis écologique de la politique de bétonisation du Grand-Bornand
Ca y est ! L’obtention du label Flocon Vert tant désiré par la mairie du Grand Bornand est officielle et fait même les choux gras de son dossier presse et ce malgré les avertissements de dérive de « bétonnisation » outrancière de la part de la commune relatés par un participant à la démarche de labellisation directement à la directrice de Mountain Riders. Voici ci-dessous sa lettre de démission qui explique pourquoi le Flocon Vert est une farce.
Bonjour à tous,
A la lecture du dernier compte rendu du conseil municipal en date du 25 février j’ai appris que le conseil municipal a voté la réalisation d’un tunnel de 80m entre l’espace Grand Bo et le stade de biathlon pour un montant de 1 168 000 euros et qu’aux dernières informations les travaux débuteront vers la mi-mars. Stupéfiant de cynisme en regard de l’année douloureuse qui vient de passer ! Alors que les stations sont en plein marasme, que les restaurants, hôtels, magasins de sport sont empêtrés dans difficultés extrêmes et que bon nombre de saisonniers, les oubliés des instances dirigeantes, survivent avec difficultés, et dont certains sont à la rue, le premier soucis de la mairie et en réponse à la situation actuelle, est de réaliser un quatrième tunnel en béton sur la commune qui sera écologiquement et visuellement une pollution. Cela est déjà un scandale en soi. Mais ce qui rajoute de l’ignominie à ce projet, c’est l’inanité de la finalité de l’ouvrage. En effet cette réalisation n’a que pour seul but de faciliter l’accès au pas de tir des athlètes, des officiels et des médias, et excusez du peu, à l’abri des intempéries. Dites-moi donc, en quoi, le fait de dépenser presque 1200 000 euros pour le confort de quelques privilégiés est-il représentatif de la volonté de la mairie de s’engager sur la voie de la transition écologique. Sincèrement, peut-on encore croire à la véracité du discours d une mairie qui jure ses grands dieux de protéger l’environnement bornandins et qui courbe l’échine devant les exigences anachroniques et dévastatrices de la toute puissante IBU ? Ne serait-ce point là l’expression de la continuité d’une politique du tout ski qui s’emballe ?
Ceci étant, le pire n’est pas ce projet, bien que désastreux pour les raisons évoquées plus haut, mais bien les programmes de développement du domaine skiable et surtout les programmes immobiliers en gestation, certains en sous marin, impactant des dizaines d’hectares.
Les projets liés au développement du domaine skiable :
- La liaison par un gros porteur avec La Clusaz avec création de piste nécessitant un déboisement considérable.
- Retenue collinaire de 200 000 m3 aux environs de 2030.
Ces deux projets étant situés sur le Danay qui est un espace encore préservé et à peu près intact.
- La route de la nouvelle pour le nouveau garage des dameuses qui verra la disparition quasi totale du bois de la Coure.
- Équipement de la face est du Lachat avec création de piste et d’un lac artificiel pour des canons à neige Télésiège Pont de la Mattaz-Le Rosay qui se fera très prochainement selon les dires péremptoires de Jean Bourcet lors de la première réunion.
Jusqu à ce jour, la mairie n’a, à aucun moment, émis le moindre signe de vouloir remettre en cause cette politique de développement dangereuse pour l’environnement.
Autre domaine et non des moindres, les programmes immobiliers sur la commune et dont certains s’élaborent en sous marin, tels que : Le Roc des Tours en cours d achèvement, programme SOGIMM de deux immeubles aux Bruyères, programme Régency de 700 logements à l’entrée du Chinaillon, programme MGM de trois immeubles vers le pont de Suize, ce qui en estimation basse équivaudrait aux alentours de 1000 lits supplémentaires sur la commune. Et je ne parle pas des projets, notamment MGM, en gestation que ce soit aux Côtes ou au pont de Suize avec le rachat de l’hôtel des glaïeuls et du terrain contigu appartenant à la famille Perrillat du Pont de Suize. Et la liste est loin d’être close. Alors que l’on m’explique comment combattre la saturation de nos routes et l’augmentation asymptotique de l’empreinte carbone qui l’accompagne, sujet fondamental de la commission mobilité s’il en est, si dans le même temps des milliers de lits se bâtissent. Face à ce problème de flux routier qu’impliquent tous ces lits et qui flirte avec le cauchemar, la piétonnisation de la place ne montre-t-il pas plus le renforcement d’un aveuglement plutôt qu’une avancée vers la transition écologique? Honnêtement, croyez-vous que cette proposition soit une avancée significative pour une reconversion à un tourisme quatre saisons et décarboné face au déferlement de pelles mécaniques et bulldozers qui annoncent, outre les dommages et dégradations auxquelles nous sommes habitués maintenant depuis des années, une urbanisation effrénée et la disparition de prés et d’alpages ?
Sans doute trouvez-vous mes propos outranciers et radicaux. Alors voici quelques extraits d une interview d Alain Boulogne, maire des Gets de 2001 à 2008 et vice-président de la Commission Internationale pour la Protection des Alpes. Je cite :
« Le risque que le ski devienne une survivance des excès du XXème siècle et qu’il soit considéré comme un modèle totalement ringard est grand » « La réponse n’est pas de mettre de l’huile bio dans les dameuses. Les labels type Flocon vert donnent bonne conscience aux stations, mais ne règlent rien. Ça reste du greenwashing. » « Pourquoi construire de nouveaux lits ? Il y a une confusion complète entre vivre du tourisme et de l’immobilier. » « Par ailleurs, l’argent mis dans les canons à neige par la région Rhône-Alpes provoque un effet désastreux, renforçant l’idée que la seule solution, c’est l’enneigement artificiel. »
Et puisque je suis dans le citations, oserais-je vous rappeler la morale de la fable « La grenouille qui se veut faire aussi grosse que le boeuf » de La Fontaine qui brava en son temps Louis XIV, fable qui illustre parfaitement l ambition de la commune :
La chétive Pécore
S’enfla si bien qu’elle creva.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages :
Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs,
Tout petit prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages.
Ainsi vous comprendrez que je ne puisse, afin d’être cohérent avec ce que je prône depuis des années, tolérer les ravages, les nuisances et le bilan carbone désastreux de tels projets soutenus corps et âme par la mairie actuelle et que dans le même temps je sois dans une commission de cette même mairie pour l’obtention d’un label, dit vert.
En conclusion et sachant tout cela, vous comprendrez aussi que je vous signifie ma démission par ce mail et donc vouloir cesser toute participation à l’obtention du label Flocon Vert, ne voulant plus être associé, sinon être complice d une démarche, somme toute au départ vertueuse, qui vire à la mascarade, voir la farce, et se confirme bien au fil du temps être du « green washing ».
Marc Lucchesi.